Définition de ENFUIR (S')

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : an-fuir

DÉFINITIONS

1
Se retirer en toute hâte, en prenant la fuite. S'enfuir au moment du danger. S'enfuir de prison.
C'est, me dit-il, notre grand et incomparable Molina, qui, par sa prudence inimitable, l'a estimée [une somme volée] à six ou sept ducats, pour lesquels il assure qu'il est permis de tuer, encore que celui qui les emporte s'enfuie
Si tôt qu'elle me voit, elle s'enfuit de moi
de RACAN dans Bergeries, II, 4, le Satyre
Ceux qui me voyaient s'enfuyaient
de Isaac Louis Lemaistre de SACY dans Bible, psaume XXX, 12
Et son âme en courroux s'enfuit dans les enfers
J'ai vu des citoyens s'enfuir avec horreur
Et quand la nuit revient en cet affreux château, De Saphire éplorée on revoit l'ombre errante ; Elle tient dans ses mains une tête sanglante, La presse sur son sein, et l'embrasse et s'enfuit
de MASSON dans Helv. v.
Un maître fou qui, dit-on, Fit jadis mainte fredaine, Des loges de Charenton S'est enfui l'autre semaine
de Pierre Jean de BÉRANGER dans Juge de Char.
Avec ellipse du pronom personnel. Comment l'avez-vous laissé enfuir ?
Sémantique : Par extension.
Les rivages s'enfuyaient loin de nous
2
S'évanouir, disparaître. Le temps s'enfuit.
Pour toute récompense il n'obtient qu'un vain bruit, Qu'un triomphe frivole, un éclat qui s'enfuit
La coupe de mes jours s'est brisée encor pleine ; Ma vie en longs soupirs s'enfuit à chaque haleine ; Ni larmes ni regrets ne peuvent l'arrêter
Qu'est-ce donc que des jours pour valoir qu'on les pleure ? Un soleil, un soleil, une heure et puis une heure ; Celle qui vient ressemble à celle qui s'enfuit
de Alphonse de LAMARTINE dans ib.
3
S'échapper d'un vase, en parlant d'une liqueur. Votre vin s'enfuit. Le lait s'enfuira bientôt.
Sémantique : Par métonymie. On dit qu'un vase s'enfuit, lorsqu'il laisse échapper la liqueur qu'il contient. Ce tonneau s'enfuit. Aujourd'hui on se sert plus ordinairement de fuir.
Sémantique : Fig. Ce n'est pas par là que le pot s'enfuit, ce n'est pas par là que l'affaire peut manquer.

REMARQUE

1
Autrefois et jusque dans le XVIIe siècle, on a considéré, dans s'enfuir, la préposition comme mobile.
Vite, fuis-t'en
de Jean de LA FONTAINE dans Lunet.
Ils s'en sont fuis
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Excus. 2

HISTORIQUE

1
XIe s.
Si est aucuns qui blamet seit et si il s'en fuist....
dans Lois de Guill. 48
Dient Franceis : Dehait [mal] ait qui s'enfuit
dans Ch. de Rol. LXXX
Fuïr s'en [il] velt, mais ne lui valt nient
dans ib. CXXIII
De ce cui chaut ? Fuït s'en est Marsiles
dans ib. CXLI
2
XIIe s.
Que est à tei, mer, que tu t'enfuis ? e tu, Jordain, que tu ies convertiz ariere ?
dans Liber psalm. p. 176
Fuit s'en fel Guenes, grant paor a de soi
dans Ronc. p. 183
Absalon s'enfuid à Tholomai le fiz Amiur le rei de Jessur, e là demeurad treis ans
dans Rois, p. 167
3
XIIIe s.
Belle, fuiez vous en, n'y soit plus delaié [tardé]
dans Berte, XX
Je m'en foï sans plus atendre
dans la Rose, 7314
S'il s'enfuit, il a perdu honnor et tout ce qu'il tient en fief
4
XIVe s.
C'est en cest siecle ung grant deluge ; N'est celuy qui d'elle [de la mort] s'enfuge
dans Liv. du bon Jehan, 25
5
XVIe s.
Si estonné et si transi qu'il ne pouvoit prendre party de s'enfuyr
de Michel de MONTAIGNE dans I, 62

ÉTYMOLOGIE

1
En 2, et fuir ; provenç. enfugir.